lundi 17 mars 2008

anecdote culinaire


Un jour, ma grand-mère m’appela dans la cuisine familiale. J’accourus en pensant qu’elle se sentait mal. Je la vis debout, près des casseroles et elle me dit : « Oh ma chérie ! Quand je pense que j’étais une très bonne cuisinière et aujourd’hui, je ne sais pas si je dois casser les œufs ou sortir la poêle en premier pour faire une omelette… ». Je l’ai senti effondrée et je crois que j’étais dans le même état à ce moment là.
Je me suis penchée pour prendre une poêle dans le placard du bas, puis me suis rapproché du frigo pour y trouver 4 œufs et je saisissais un par un les éléments dont elle avait besoin. Je les ai placés dans un ordre chronologique, face à elle et je suis partie 10 bonnes minutes. A la fin de ce laps de temps, je suis revenue, un peu inquiète malgré moi. Elle était assise sur une chaise de la salle à manger et l’omelette était cuite, sur un plat, encore fumante. J’ai cru un instant que tout ce qu’il s’était passé avant cet intervalle-temps n’était qu’illusion, cauchemar, image subliminale. J’ai cru qu’elle n’était plus atteinte d’Alzheimer et qu’elle n’avait jamais eu cette maladie. J’ai cru que mémé était redevenue mémé. Elle prit deux fourchettes dans le tiroir et nous avions goûté sa réussite culinaire. Quand, soudain, elle prononça cette phrase : « mmmh délicieuse ! Vraiment, je trouve que cette ratatouille est exquise ! ». Mes jambes m’ont lâché, j’ai prétexté une envie urgente et je suis partie me réfugiée dans les toilettes. J’ai pleuré. C’était un sanglot, le genre de sanglot qui brûle les yeux et qui arrache la gorge. Ma bouche essayait de pousser un cri en vain… Une souffrance silencieuse .
Après quelques minutes, je suis ressortie, les yeux secs et encore injectés de sang, j’ai regagné la cuisine et j’ai serré très fortement ma grand mère. Je lui ai murmuré à l’oreille : « Oui, elle est très bonne ta ratatouille Jeanne mais demain on fait une omelette ! ».





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